Bayushi Iwamori

(L’histoire d’Iwamori est racontée par Francis, un personnage que le lecteur pourra découvrir plus tard)

Autrefois, il y a très longtemps, vivait une espèce de singes peu amusants appelée les humains. Ces êtres peuplaient une planète ordinaire nommée la Terre, en orbite autour d’une étoile banale, dans une galaxie moyenne, et dans un coin de l’univers peu enthousiasmant. Sur Terre, seuls les humains étaient capables de parler. On ne savait pas trop pourquoi, alors on racontait que les humains avaient volé la parole aux animaux.

Demeure d'Iwamori

Les humains habitaient un vaste archipel et avaient l'habitude de se regrouper en familles qu’ils appelaient des clans. Chaque clan avait un animal totem. Les clans les plus importants étaient ceux du lion, de la grue et du dragon. Il existait également de nombreux autres clans dits mineurs. Les clans étaient tous très fiers de leurs totems, qui étaient le plus souvent des animaux puissants ou fantastiques. Ils cherchaient à choisir des animaux qui avaient de l'élégance.

Ancienne peinture représentant un animal qui a de la classe: le Phoenix (non ce n’est pas un poulet)

Dans chaque clan, un chef appelé le Daimyo était désigné selon les traditions familiales. Le daimyo avait la responsabilité d’assurer la sécurité de son clan sur son territoire. Tous les daimyos devaient jurer fidélité à l’empereur, le chef de tous les clans. L’empereur était le seul à pouvoir de créer de nouveaux clans mais il désignait toujours un Shogun pour le représenter et faire le travail à sa place. La plupart des daimyos ne plaisantaient pas beaucoup, et le Shogun encore moins...

Le palais de l’empereur

Iwamori regardait le soleil se lever sur la montagne depuis son balcon situé au sommet de sa demeure montée sur pilotis. Il n’y avait pas de vent ce matin et le lac reflétait les premiers rayons de soleil. Iwamori ferma les yeux pour mieux sentir la douce présence sur son visage. « Puisses-tu me donner la force d’être chaque jour un peu meilleur », pensa-t-il.

Iwamori sur son balcon au lever du soleil

Il rouvrit les yeux et remarqua un samouraï chevauchant seul sur le chemin qui montait vers le lac. Les nobles visiteurs se faisaient rares à cette époque de l’année. « Peut-être un signe du destin », pensa-t-il.

Iwamori commença à s’entrainer sur son vaste balcon. Il avait quarante-six ans et toute sa vie, il avait perfectionné son art du combat au katana. Il était invaincu en duel, mais comme les samouraïs n’acceptaient pas facilement la défaite, les duels étaient presque toujours à mort. Mieux valait être invaincu si on voulait rester en vie.

Iwamori avait également mené plusieurs fois des armées au combat. Il avait remporté toutes les victoires sur les champs de bataille, à l’exception d'une fois... Il avait dû concéder une défaite car son Daimyo lui avait ordonné de perdre. Il était convaincu qu'il aurait dominé son adversaire et qu'il l'aurait emporté s'il avait véritablement disputé le combat. « Sur le champ de bataille, toutes les actions sont nobles », lui avait-on expliqué. Iwamori avait veillé à perdre le combat sans que quiconque ne puisse le soupçonner, c’est-à-dire en versant le sang de ses hommes. Il ne savait pas pourquoi le Daimyo du clan du Scorpion avait donné cet ordre. Il était certainement préférable qu'il l'ignore. Il s'était simplement acquitté de son devoir. « Pour mener il faut d’abord apprendre à suivre », répétait-il à ses hommes. Et puis de toutes façons, ça ne se serait certainement pas très bien passé s’il avait essayé de discuter les ordres de son Daimyo.

La demeure d’Iwamori

En duel, Iwamori n’avait jamais été touché. Il savait lire les mouvements de l’adversaire, il pouvait percevoir leurs intentions à leur regard. Au moindre faux pas, Iwamori touchait avec une précision redoutable. Sans que ses coups eussent besoin d’être puissants, à la force de sa volonté, Iwamori infligeait toujours une mort rapide et honorable à ses adversaires. Une fois il avait combattu à trois contre un… Autant dire qu’en combat au katana, Iwamori ne rigolait vraiment pas.

Il répéta ses mouvements comme chaque matin au lever du soleil. Il n’était ni très grand, ni très fort, bien qu’il s’entrainât aussi pour le devenir davantage. Le secret de son art n’était pas la force mais la concentration. Iwamori savait ne faire qu’un avec les éléments qui l’entouraient, aucune pensée n’encombrait son esprit. Il percevait chaque souffle du vent sur sa peau, le moindre frémissement dans l’air. Il pouvait combattre les yeux fermés. Pour devenir samouraï, la cérémonie du genpuku, l’épreuve finale de son initiation, consistait à combattre nu les yeux fermés contre un adversaire en armure. Le combat avait duré moins d’une minute. Iwamori avait touché deux fois : au premier coup, le heaume de l’armure avait volé dans un coin du dojo, au second coup, la tête du combattant fut tranchée nette. « Je n’apprends rien en gagnant », avait-il déclaré lors de la cérémonie.

Pour acquérir ce niveau de concentration, Iwamori avait passé un an en stage dans la montagne du clan du dragon. Les stages dans le clan du dragon ne plaisantaient pas du tout. D’abord, il fallait faire vœu de silence pendant toute la durée du stage. Pas un mot ne devait sortir de sa bouche pendant un an. Si un des stagiaires parlait, les senseis du clan du dragon les faisaient recommencer à zéro. Ensuite, il n’y avait rien d’autre à faire que de la méditation toute la journée. Iwamori avait le droit à deux heures d’entraînement par jour, le reste du temps, c’était méditation du matin au soir. Avant de passer l’épreuve finale, il fallait survivre pendant trente jours seulement en buvant l’eau de la rivière. L’épreuve finale consistait à rester parfaitement immobile dans une position au choix du stagiaire pendant trois jours.

Iwamori en stage dans la montagne du clan du Dragon

Lorsque sa séance d’entraînement prit fin, Iwamori laissa son esprit reprendre le cours de ses pensées. Le visiteur qu’il avait remarqué au lever du soleil devait être arrivé. De loin, il avait cru remarquer un oiseau sur sa bannière, peut-être un messager du clan de la grue, le clan du Shogun. « Mieux vaut ne pas faire attendre un envoyé du Shogun. », pensa-t-il.

Il rentra dans ses appartements et vit son homme de confiance qui attendait devant la porte qu’il eût terminé son entraînement. D’un regard, Iwamori donna la parole au serviteur : « Iwamori-sama, un samouraï prétendant être un envoyé du Shogun est arrivé ce matin et demande audience. »

« Comment s’est-il présenté ? », demanda Iwamori, curieux d’obtenir davantage de détails.

« Oui, hum », reprit le serviteur un peu gêné, « Il dit s’appeler Isawa Tenzen, daimyo du clan de la chouette. »

Iwamori réprima un soupir. « Daimyo du clan de la chouette ? », pensa-t-il. « Mais qu’est-ce que c’est que ce guignol ? »

« Un envoyé du Shogun ? », demanda Iwamori, sceptique.

« Il m’a montré un parchemin frappé du sceau impérial, seigneur », répondit le serviteur.

Iwamori porta son regard sur le scorpion de jade sculpté sur son bureau. « Ce Shogun n’est quand même pas très sérieux », pensa-t-il. « Pourquoi pas un clan de la chèvre, pendant qu’on y est ? » Iwamori prit soin de ne montrer aucun signe de son dédain au serviteur.

« Il a précisé qu’il se présentait à titre personnel et que le message du Shogun ne vous était pas adressé personnellement. » continua le serviteur.

« Fais-lui servir un bon repas. Et fais-le entrer en début d’après-midi », ordonna Iwamori.

« Entendu, Iwamori-sama », acquiesça le serviteur.

 

Ce chapitre est dédié à mes amis Bud, Mounette, Vinz, Arnaud et François.

 
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